Après les fauteuils contaminés, d'autres produits, et de nouvelles victimes
mardi 05.04.2011, 05:20 -
PAR GEOFFROY DE SAINT GILLES
L'Union européenne vient de lancer un « appel à contributions » pour ficeler son dossier d'interdiction du fumarate de diméthyle (DMFu). Un produit antimoisissure utilisé par des industriels chinois pour traiter des canapés, des chaussures, des sacs... Des milliers d'acheteurs ont été et continuent d'être victimes de brûlures et de démangeaisons.
Christian s'empare de son ordinateur il y a seulement deux mois, pour écrire au collectif DMF : « Je me retrouve avec des problèmes respiratoires, ainsi que des rougeurs et démangeaison, sur les jambes, les mains et le ventre. »
Une ritournelle des victimes du fumarate de diméthyle (DMFu). Christian a établi le lien entre ses souffrances et son nouveau jean grâce au compagnon de sa fille, atteint des mêmes symptômes en Espagne. Son gendre avait acheté un vêtement identique. Comme au-delà des Pyrénées, la France, l'Angleterre, la Finlande ont été touchées par ce produit chimique. Dans le Nord, une association de victimes emmenée par Claudette Lemoine rassemble 538 personnes, dont 153 ont déposé plainte.
Utilisé en Chine, le produit chimique ne connaît pas de frontières. Sa propriété antifongique est appréciée pour les longs voyages des diverses productions dans les cales humides des bateaux. Après contact avec la peau, certaines personnes accusent des démangeaisons quand d'autres souffrent de brûlures, la peau partant parfois en lambeaux.
En juillet 2008, Conforama envoyait 38 000 courriers aux acheteurs de fauteuils relax et canapés pour leur indiquer qu'il existait un risque d'allergie cutanée. Les autorités sanitaires s'emparaient du dossier et interdisaient le DMFu dès le mois de décembre. Les milliers de victimes qui comprenaient alors l'origine de leurs maux rejoignaient une association, parfois un avocat, tandis que d'autres traitaient directement avec l'assureur de Conforama. En Angleterre, les fournisseurs de meubles ont été condamnés à verser 24 millions d'euros à 1 650 victimes, en proportion de leur préjudice. En France, le parquet de Paris a estimé qu'il n'y avait pas matière à procès... L'interdiction du DMFu n'a pas suffi à l'éradiquer. En mars, Carrefour retirait 6 000 paires de chaussures qui, après la plainte d'un client, révélaient un taux de 0,4 mg/kg de DMFu. Les souliers venaient d'Inde.
Pour Claudette Lemoine, il est assez logique que l'on retrouve du DMFu : « Les commerçants qui avaient des milliers de marchandises contenant du DMFu n'allaient pas les jeter ! » « Le contrôle sera difficile... pour ne pas dire impossible ! », lance Caroline Morin du collectif DMF (60 plaintes) qui espère « une réglementation sur ce produit ». Les douanes assurent effectuer des contrôles depuis mars 2009, quand la Commission européenne a décidé d'une restriction de la mise sur le marché de ce produit. L'Agence européenne des produits chimiques (ECHA) fournit une explication : « Si une décision d'interdiction permanente est prise, des périodes transitoires en ce qui concerne les stocks doivent être prises en considération. » Et l'ECHA renvoie vers les États pour régler ce problème. L'Agence nationale de sécurité sanitaire (ANSES) doit rendre son rapport d'expertise final dans quelques semaines.